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Entorses du genou


Spécialité : traumatologie /

Points importants

  • On distingue plusieurs types d'entorses en fonction des lésions et de l'examen clinique
  • Cela va du plus simple au plus compliqué en sachant que, dans bien des cas, il faudra s'aider d'une IRM ou d'un examen sous anesthésie
  • Ces lésions doivent être gérées en collaboration avec un chirurgien orthopédiste compétent en chirurgie du genou
  • Les entorses graves du genou sont celles qui intéressent le pivot central à savoir le LCA et/ou le LCP et qui peuvent conduire à une invalidité dans la vie quotidienne ; il ne faut pas passer à côté d'une éventuelle indication chirurgicale en urgence car les séquelles des laxités périphériques sont souvent très difficiles à traiter « à froid »
  • Les lésions du LCP sont relativement rares, surtout en pratique sportive, et passent volontiers inaperçues dans le cadre de l'urgence
  • Les ruptures isolées du LCP peuvent, dans certains cas, parfaitement cicatriser avec un traitement orthopédique précoce et bien conduit

Présentation clinique / CIMU

ENTORSE DU LLI (ligament collatéral médial)

  • Douleur sur le LLI (surtout insertion fémorale)
  • Pas de tiroir, genou en flexion, ni près de l'extension (pas de Lachman), pas de ressaut
  • Laxité interne nulle ou modérée
  • Radiographies : habituellement normales

RUPTURES « ISOLEES » DU LCA

  • La « rupture isolée » correspond à l'absence de lésions périphériques sans préjuger des lésions méniscales éventuelles

_917 - - - Lésions méniscales

Interrogatoire

  • Notion de claquement ou craquement
  • Douleur brutale
  • Dérobement avec sensation de « patte folle »
  • Instabilité immédiate
  • Epanchement articulaire immédiat ou secondaire

Examen clinique

_916 - - - Examen clinique du genou

_912 - - - Choc rotulien

ENTORSES GRAVES AVEC LAXITES PERIPHERIQUES

Entorses antéro-internes (antéro-médiales)

  • Elles intéressent le plan capsulo-ligamentaire interne et le LCA
  • Examen clinique :
    • laxité en valgus-flexion et/ou en valgus-extension (en fonction de l'atteinte de la coque condylienne ou non)
    • tiroir en flexion majoré par la rotation externe du pied
    • test de Lachman positif
    • ressaut positif parfois masqué par la laxité médiale (bâillement interne au moment de la recherche du ressaut)

Entorses antéro-externes (antéro-latérales)

  • Elles intéressent le plan capsulo-ligamentaire externe et le LCA
  • Cliniquement on retrouve :
    • une laxité en varus-flexion et/ou en varus-extension (en fonction de l'atteinte du complexe ligamentaire postéro-externe - LLE, poplité, tendon du biceps fémoral, coque condylienne etc.)
    • un recurvatum-test de Hughston positif
    • un tiroir en flexion positif avec hypermobilité du compartiment externe du genou
    • un ressaut positif

Entorses antéro-postérieures

  • Elles intéressent les 2 ligaments croisés (lésions bicroisées) avec soit le plan capsulo-ligamentaire interne soit le plan capsulo-ligamentaire externe
  • Il s'agit de véritables « luxations avortées » du genou et la conduite à tenir doit être la même que dans les luxations du genou

RUPTURES DU LCP

  • 2 formes :
    • ruptures isolées du LCP
    • ruptures qui intéressent les formations capsulo-ligamentaires périphériques :
      • lésions relativement rares, surtout en pratique sportive, et qui passent volontiers inaperçues dans le cadre de l'urgence

Ruptures isolées du LCP

  • Souvent impact sur la tubérosité antérieure du tibia (TTA) ou à proximité (au moins 50% des cas)
  • Douleur dans le creux poplité
  • Parfois choc rotulien évoquant une hémarthrose
  • Absence de laxité périphérique
  • Faux Lachman (tiroir antérieur avec arrêt dur correspondant à la correction du tiroir postérieur spontané)
  • Avalement de la TTA (+++) genou en flexion à 70-80°, correspondant à un tiroir postérieur spontané :
    • lorsque que l'on fait la manoeuvre du tiroir dans cette position, la présence d'un tiroir antérieur correspond en fait à la réduction du tiroir postérieur, d'où la notion « de faux tiroir antérieur »

_420 Photo Avalement de la tubérosité tibiale antérieure

  • Absence de ressaut

Ruptures du LCP associées à des lésions périphériques

  • = Entorses postéro-postéro-externes (rupture du LCP et du plan capsulo-ligamentaire postéro-externe) et entorses postéro-postéro-internes (rupture du LCP et du plan capsulo-ligamentaire postéro-interne)
  • Signes de rupture du LCP (avalement de la TTA, absence de ressaut) + signes de laxité périphérique (cf. entorses antérieures)
  • L'avis chirurgical en urgence est indispensable car, la plupart du temps, il s'agit d'une indication opératoire

Signes paracliniques

RUPTURES "ISOLEES" DU LCA

Radiologie

  • Le bilan radiographique (F, P, Défilés) est souvent normal
  • Il permet de visualiser :
    • une fracture de Segond que l'on retrouve dans 5 à 10% des cas et qui signe la rupture du LCA
      • _456 Photo Fracture de Segond
    • une fracture-avulsion du massif des épines tibiales que l'on retrouve également dans 5 à 10% des cas
      • _457 Photo Fracture-avulsion du massif des épines tibiales
    • parfois on observe une encoche du condyle externe sur l'incidence de profil ; lorsque la profondeur est > 5 mm, sa présence permet d'affirmer la rupture du LCA  
      • _458 Photo Contusion osseuse signant la rupture du LCA
  • D'éliminer une fracture minime du plateau tibial ou une dysplasie fémoro-patellaire souvent présente dans les luxations traumatiques de la rotule (cf. luxation traumatique de la rotule)

IRM

  • L'IRM devient, de plus en plus, un examen incontournable pour voir les lésions associées (lésions méniscales, contusions osseuses)

_460 Photo IRM montrant la rupture du LCA

  • Peu de raisons pour la demander en urgence
  • La chirurgie du LCA est effectuée en urgence différée (au-delà du 2e mois) plutôt qu'en urgence (moins de raideurs, moins d'algodystrophies, moins de genoux douloureux résiduels, etc.)

ENTORSES GRAVES AVEC LAXITES PERIPHERIQUES

Radiologie

  • Le bilan radiographique est indispensable pour éliminer une éventuelle fracture associée

IRM

  • L'IRM ne doit pas faire retarder la prise en charge chirurgicale si celle-ci est justifiée (examen sous anesthésie aussi performant voire plus performant dans des mains expérimentées)

RUPTURES DU LCP

Radiologie

  • La radiographie est souvent normale
  • Cependant, dans certains cas, elle peut montrer une discrète translation postérieure du tibia (à comparer avec le côté opposé) ou une fracture-avulsion de l'insertion tibiale du LCP
  • Il est très important de quantifier le tiroir postérieur par des clichés dynamiques de profil genou fléchi à 90° ce qui orientera l'indication thérapeutique

_462 Photo Tiroir postérieur supérieur à 10 mm

IRM

  • L'IRM est de plus en plus demandée pour confirmer le diagnostic (voir la localisation de la rupture) et visualiser les lésions associées éventuelles

_463 Photo IRM montrant une rupture du LCP

  • L'IRM ne doit pas faire retarder la prise en charge chirurgicale si celle-ci est justifiée (examen sous anesthésie aussi performant voire plus performant dans des mains expérimentées)

Diagnostic étiologique

  • Entorses du LLI (ligament collateral medial)
  • Ruptures « isolées » du LCA
  • Entorses graves avec laxités périphériques
  • Ruptures du ligament croisé postérieur

Diagnostic différentiel

ENTORSES DU LLI (ligament collatéral médial)

  • Lésion du ménisque interne (douleur sur l'interligne interne)
  • Luxation spontanément réduite de la rotule (cf. luxation de la rotule)
  • Contusion face interne du genou (mécanisme différent)

RUPTURES« ISOLEES » DU LCA

Il faut éliminer :

  • Entorse du LLE (ligament collatéral latéral) : celle-ci n'existe pas ou est exceptionnelle à l'état isolé
  • Lésions du ménisque interne et/ou du ménisque externe :
    • ces lésions peuvent se voir à l'état isolé (cf. lésions des ménisques) mais peuvent aussi être associées aux ruptures du LCA
    • une douleur de l'interligne interne et/ou externe associée à un déficit d'extension douloureux et « élastique » doit évoquer la possibilité d'une lésion en anse de seau du ménisque concerné
    • l'IRM vient, le cas échéant, confirmer le diagnostic
  • Contusion du genou (hormis la douleur, tous les signes objectifs de l'examen clinique sont négatifs)
  • Luxation traumatique de la rotule

Traitement

ENTORSES DU LLI (ligament collatéral médial)

  • Attelle amovible ou plâtre pendant 30 à 45 jours
  • Jamais de strapping car risque de flexum antalgique irréductible
  • En cas d'attelle, toujours associer de la rééducation pour éviter l'installation d'un flexum antalgique qui risque de mettre des mois à disparaître

RUPTURES « ISOLEES » DU LCA

  • Attelle amovible pendant 8 à 10 jours
  • Avec antalgiques et anti-inflammatoires
  • Les anticoagulants sont discutables chez les patients sans risque majeur
  • Rééducation immédiate (physiothérapie anti-inflammatoire, récupération des amplitudes normales, musculation du quadriceps et des ischio-jambiers)
  • Nouveau bilan 8 jours plus tard si doute sur le diagnostic, avec possibilité de demander des clichés en stress sur appareil Telos® permettant de visualiser le tiroir antérieur et de le quantifier 

_459 Photo Recherche de tiroir antérieur sur appareil Telos®

  • Arthroscopie inutile pour voir la rupture éventuelle du LCA
  • Les fractures-avulsions du massif des épines tibiales peuvent conduire, dans certains cas, à une indication chirurgicale en urgence (gros fragment déplacé) : un avis spécialisé précoce s'impose dans ce cas-là entorses graves avec laxités périphériques

ENTORSES GRAVES AVEC LAXITES PERIPHERIQUES

  • Ne pas passer à côté d'une éventuelle indication chirurgicale en urgence car les séquelles des laxités périphériques sont souvent très difficiles à traiter « à froid »
  • Le bilan radiographique est indispensable pour éliminer une éventuelle fracture associée
  • L'IRM ne doit pas faire retarder la prise en charge chirurgicale si celle-ci est justifiée (examen sous anesthésie aussi performant voire plus performant dans des mains expérimentées)
  • Intervention chirurgicale en urgence des genoux avec laxité périphérique en extension
  • Genoux qui n'ont qu'une laxité en flexion qui s'annule en extension :

RUPTURES DU LIGAMENT CROISE POSTERIEUR

Ruptures isolées du LCP

  • Un avis chirurgical est indispensable dans la semaine qui suit le traumatisme
  • Le genou peut être immobilisé temporairement dans une attelle amovible
  • L'IRM est de plus en plus demandée pour confirmer le diagnostic (voir la localisation de la rupture) et visualiser les lésions associées éventuelles

_463 Photo IRM montrant une rupture du LCP

  • Le traitement est actuellement controversé (chirurgie ou traitement orthopédique) :
    • immobilisation plâtrée genou en extension (position de réduction de la translation postérieure) pour une durée de 45 jours
    • seules les fractures-avulsions de l'insertion tibiale du LCP sont opérées en urgence

Ruptures du LCP associées à des lésions périphériques

  • Le plus souvent, indication opératoire => avis chirurgical en urgence
  • L'IRM ne doit pas faire retarder la prise en charge chirurgicale si celle-ci est justifiée (examen sous anesthésie aussi performant voire plus performant dans des mains expérimentées)

Surveillance

ENTORSES DU LLI (ligament collatéral médial)

  • En cas d'attelle, toujours associer de la rééducation pour éviter l'installation d'un flexum antalgique qui risque de mettre des mois à disparaître

RUPTURES « ISOLEES » DU LCA

  • Rééducation immédiate (physiothérapie anti-inflammatoire, récupération des amplitudes normales, musculation du quadriceps et des ischio-jambiers)
  • Nouveau bilan 8 jours plus tard si doute sur le diagnostic, avec possibilité de demander des clichés en stress sur appareil Telos® permettant de visualiser le tiroir antérieur et de le quantifier

_459 Photo Recherche de tiroir antérieur sur appareil Telos®

Bibliographie

  • Traumatologie à l'usage de l'urgentiste. Sous la direction de Dominique Saragaglia. Editions Sauramps Médical. 2004

Auteur(s) : Jean-Jacques BANIHACHEMI, Dominique SARAGAGLIA