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Intoxication aux inhibiteurs de la recapture de la sérotonine


Spécialité : toxicologie /

Points importants

  • Essor, ces dernières années, des prescriptions de ces antidépresseurs dits de seconde génération.
  • Lors des intoxications, ils sont habituellement associés à une moindre mortalité comparée aux antidépresseurs tricycliques.
  • Le pronostic vital est lié à l’apparition d’un syndrome sérotoninergique, et sa prise en charge doit être d’emblée agressive.
  • Il existe des formes cardio-vasculaires graves et mortelles superposables à l’effet stabilisant de membrane décrit avec les antidépresseurs tricycliques.
  • Il n’existe pas de lien entre la sévérité clinique et la dose suspectée ingérée ou la concentration plasmatique. La gravité de l’intoxication semble surtout fonction des interactions médicamenteuses des antidépresseurs entre eux ou avec d’autres toxiques co-ingérés.

Présentation clinique / CIMU

CONTEXTE

  • Antécédents de dépression et notion de traitement en cours
  • Introduction ou augmentation des doses d’un traitement
  • Intoxication médicamenteuse volontaire (boites vides…)
  • Association pro-sérotoninergique

LE SYNDROME SEROTONINERGIQUE

Neuro-psychique

  • Symptômes majeurs :
    • confusion
    • encéphalopathie
  • Symptômes mineurs :
    • hyperactivité
    • insomnie
    • agitation
    • instabilité psycho-motrice

Dysautonomie

  • Symptômes majeurs :
    • hyperthermie
    • sueurs profuses
  • Symptômes mineurs :
    • tachycardie
    • tachypnée / dyspnée
    • HoTA ou HTA
    • flush
    • diarrhée

Neuromusculaire

  • Symptômes majeurs :
    • clonies, myoclonies
    • hypertonie
    • tremblements
    • frisson
    • hyperréflexie ostéo-tendineuse
  • Symptômes mineurs :
    • incoordination motrice
    • mydriase
    • acathisie
    • ataxie

Signes paracliniques

Les examen para-cliniques doivent rechercher :

  • Une déshydratation 
  • Une rhabdomyolyse 
  • Une insuffisance rénale 
  • Une coagulopathie intravasculaire disséminée 
  • Une acidose métabolique 
  • Des anomalies électrocardiographies :
    • tachycardie sinusale
    • troubles du rythme
    • un effet stabilisant de membrane 

Diagnostic différentiel

 

  • Infection évolutive : encéphalopathie septique ou méningo-encéphalite
  • Syndrome malin des neuroleptiques 
  • Syndrome adrénergique :
    • ß-adrénergique :
      • troubles digestifs (nausées, vomissements, épigastralgies)
      • signes neurologiques (agitation, tremblements, convulsions)
      • signes cardiovasculaires (flush cutané, palpitations, tachycardie, collapsus, insuffisance coronaire, troubles du rythme ventriculaire)
      • troubles métaboliques (fièvre, hyperglycémie, acidose métabolique lactique, …)
    • alpha et ß adrénergique :
      • rares troubles digestifs
      • signes neurologiques (agitation, anxiété, délire, état psychotique, confusion, sueurs, convulsions)
      • troubles métaboliques (rhabdomyolyse, insuffisance rénale)
      • troubles cardiovasculaires (HTA)
  • Syndrome anticholinergique
  • Syndrome de sevrage alcoolique :
    • confusion, agitation, tremblements, hallucinations, crises comitiales
    • tachycardie, HTA, collapsus
    • sueurs et fièvre

Traitement

Mesures générales 

  • Arrêt du traitement par antidépresseurs et des traitements favorisants
  • Hydratation salée isotonique (40 mL/kg/j)
  • Oxygénation

Syndrome sérotoninergique : formes mineures

  • Traitement anxiolytique par benzodiazépines sédatives
  • Confusions, myoclonie, hyperthermie (< 41°C) : cyproheptadine en bolus (per-os) de 12 mg puis 2 mg toutes les deux heures si les symptômes persistent

Syndrome sérotoninergique : formes majeures

  • Hyperthermie maligne (>41°C) et/ou rigidité musculaire :
    • indication à une intubation oro-trachéale
    • analgésie sédation par midazolam et dérivés morphiniques
    • curarisation par curares non dépolarisant (attention au risque d’hyperkaliémie avec la succinylcholine)
    • mesures de refroidissement

Effet stabilisant de membrane : (cf. ADTC)

En cas d’état de choc 

  • Expansion volémique
  • Privilégier initialement la Noradrenaline puis évaluation cardiaque

Surveillance

CLINIQUE

  • Température, PA, FC, conscience
  • Surveillance multi-paramétrique
  • Surveillance électrocardiographique toutes les 2 heures initialement en l’absence de trouble cardiaque notable, plus si troubles du rythme ou effet stabilisant de membrane

BIOLOGIQUE

  • Rhabdomyolyse (CPK)
  • Fonction rénale (créatininémie) et kaliémie

Devenir / orientation

Intoxication asymptomatique 

  • Sortie après surveillance clinique d’au moins 12 heures

Intoxication symptomatique forme mineure

  • Hospitalisation en unité d’hospitalisation de courte durée ou soins continus

Intoxication symptomatique forme majeure 

  • Hospitalisation en soins continus ou réanimation

Intoxication symptomatique cardio-circulatoire 

  • Hospitalisation en soins continus ou en réanimation

Mécanisme / description

  • Ce sont soit des inhibiteurs sélectifs présynaptiques de la recapture de la sérotonine, sans effet sur la recapture de la noradrénaline et de la dopamine, soit  des inhibiteurs non sélectifs de la recapture de la sérotonine (sérotonine, de noradrénaline et dopamine pour la venlafaxine ; sérotonine et de la noradrénaline pour le milnacipran)
  • Leur absorption digestive est lente de 4 à 8 heures
  • Le pic plasmatique est atteint entre 2 à 4 heures
  • Les demi-vies sont variables :
    • fluoxétine de 24 à 96 h (et 7 à 9 jours pour ses métabolites actifs)
    • fluvoxamine : 16 h
    • paroxétine : 24 h
    • sertaline : 26 h
    • citalopram : 33 h
  • Il existe, pour certains, des métabolites actifs : fluoxétine / norfluoxétine

Bibliographie

  • E.W Boyer, M Shanon. The Serotonin Syndrom. N Engl J Med. 2005 ; 352 : 1112-20.
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  • V. Danel, C. Leborgne, A. Castot. Antidépresseurs. In : C. Bismuth, ed. Toxicologie clinique. 5e ed. Paris : Médecine-Sciences Flammarion, 2000 : 182-205.
  • Ellenhorn et al. Antidepressant Agents. In : Matthew J. Ellenhorn, ed. Ellenhorn’s Medical Toxicology. 2nd ed. New York : Williams and Wilkins, 1997 : 615-23.
  • P. Harry. Intoxication par les nouveaux psychotropes. Rev Prat. 1997 ; 47 : 731-35.

Auteur(s) : Arnaud DELAHAYE