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Traumatisme crânien grave de l'adulte


Spécialité : traumatologie /

Points importants

  • La profondeur d'un TC est définie par le score de Glasgow
  • Un traumatisme crânien grave (TCG) est défini par un score de Glasgow ≤ 8
  • Un TCG d'apparence isolé doit être considéré comme un polytraumatisé jusqu'à preuve du contraire
  • Les éléments pronostics sont : hypoTA, hypoxie, hyper ou hypocapnie, hyper ou hypothermie
  • D'autres éléments d'appréciation doivent être pris en compte :
    • des signes de souffrance du tronc cérébral (troubles du tonus de type décérébration-décortication, troubles pupillaires portant sur la taille et la réactivité)
    • des signes moteurs (mono ou hémiplégie)
    • des convulsions
    • une agitation
    • du type de traumatisme (plaie crâniocérébrale, violence du choc, plaie par arme à feu)
    • d'une intoxication associée
  • 20% des patients décédés présentent une cause curable de décès : concept de mort évitable
  • Rôle majeur de l'urgentiste dans la prise en charge des premières heures d'un TCG (golden hour) dans la prévention des ACSOS (agressions cérébrales secondaires d'origine systémique)
     

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

Généraux

  • Agitation

Spécifiques

  • Détresse respiratoire
  • Signe de localisation neurologique, anomalie pupillaire
  • Pâleur cutanéomuqueuse
  • Sueurs
  • Hypothermie, hyperthermie

CONTEXTE

Terrain

  • Pic d'incidence entre 15 et 24 ans dans les deux sexes, avec une proportion plus élevée d'hommes
  • Deux autres pics d'incidence : entre 0 et 5 ans et après 65 ans

Traitement usuel

  • Rechercher systématiquement par l'interrogatoire de l'entourage la prise d'anticoagulants ou d'antiagrégants plaquettaires.

Antécédents

  • Médicaux et chirurgicaux, notion d'allergie, alcoolisme chronique

Circonstances de survenue

  • La cinétique et les modalités du traumatisme sont à rechercher
  • Accidents de la circulation (environ 50% surtout les adultes jeunes de sexe masculin)
  • Chutes (21 à 32% et sont plus fréquents aux âges extrêmes de la vie)
  • Accidents de sport, traumatismes pénétrants

EXAMEN CLINIQUE

  • Evaluer les fonctions vitales : ABC (Airways, Breathing, Circulation)

Neurologique

  • Coma avec Glasgow ≤ 8
  • Rechercher une anisocorie, un déficit neurologique, crise convulsive, otorragie, rhinorrhée

Examen du crâne

  • Recherche :
    • plaie de scalp imposant une suture en urgence (++ car risque de déglobulisation)
    • embarrure (mais diagnostic surtout radiologique)

Examen de la face

  • Recherche :
    • une rhinorrhée
    • un hématome périorbitaire (fracture de la base du crâne)
    • une otorragie
    • une paralysie faciale périphérique (fracture de rocher)
    • une fracture de massif facial, disjonction crânio-faciale, articulé dentaire

Cardio-vasculaire

  • HoTA avec ou sans signe de choc périphérique
  • ou au contraire une poussée tensionnelle

Pulmonaire

  • Signe de détresse respiratoire avec signes de lutte, respiration paradoxale, désaturation, syndrome pleural à l'auscultation, emphysème sous-cutané, craquement costal

Abdominal

  • Distension abdominale, point d'impact, plaies

Examen des membres et du bassin

  • Fracture potentiellement hémorragique (fémur, bassin),

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

  • SpO2
  • ECG
  • Hémoglobine capillaire
  • Glycémie capillaire

CIMU

  • Tri 2

Signes paracliniques

BIOLOGIQUES

  • Pas d'indication spécifique
  • GDS
  • Lactates
  • Ionogramme sanguin
  • Glycémie
  • Bilan préopératoire (si indication)
  • Toxiques urinaires et alcoolémie si conscience altérée

IMAGERIE

TDM cérébral (sans injection) prenant la charnière cervico-occipitale

Radiologie du rachis

  • Clichés standards face et profil et/ou TDM

Angioscanner, angiographie conventionnelle ou IRM

  • L'indication peut se poser à la phase aiguë d'un TC grave
  • La suspicion d'une dissection artérielle ou d'une fistule carotido-caverneuse doit inciter à réaliser un bilan angiographique
  • L'IRM, en dépit d'une très grande sensibilité (en particulier pour la mise en évidence des lésions de la ligne médiane et de la substance blanche), n'a pas fait la preuve de son intérêt à la phase aiguë du TC

Echo-doppler transcrânien

  • Peut-être réalisé en cas de suspicion d'aggravation clinique

Radiographie du crâne

  • Rares indications :
    • TC pénétrant (arme blanche)
    • recherche de balle d'arme à feu

Radiographie pulmonaire de face, radio du bassin de face, échographie de débrouillage (péricarde, plèvre, abdomen)

  • Seront réalisées de façon systématique

Traitement

TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER

Stabilisation initiale

  • Collier cervical rigide
  • Position de la tête :
    • si patient normovolémique et devant un TCG isolé : buste relevé à 30° pour améliorer le retour veineux cérébral
    • si hypovolémie ou lésion extra-crânienne : décubitus strict
  • Intubation orotrachéale si GCS ≤ 8 :
    • l'intubation se fait après anesthésie par induction à séquence rapide, en tenant compte du risque de lésion cervicale associée (maintien du rachis en rectitude lors de l'intubation), avec la connaissance des techniques alternatives à l'intubation standard en cas d'échec
  • Prévention des ACSOS en maintenant ou en restaurant immédiatement les fonctions ventilatoires et cardio-circulatoires :
    • oxygénothérapie voire ventilation artificielle pour avoir une SpO2 ≥ 90 % avec une normocapnie (PaCO2 à 35 mmHg),
    • remplissage par NaCl 0,9% ± amines (noradrénaline : 0,5-1 mg/h) pour maintenir une PAM à 80 mmHg (les solutés glucosés sont à proscrire)
  • Devant la présence de signes évocateurs d'HTIC (mydriase aréactive uni ou bilatérale, anisocorie ou toute dégradation neurologique non expliquée par une cause extra-crânienne), osmothérapie par mannitol à 20 % à la dose de 1 à 5 mL/kg en 20 min
  • Suturer une plaie du scalp avant toute imagerie où transfert en neurochirurgie
  • Si hyperthermie : découvrir le patient et antipyrétique (paracétamol : 1 g en IVL)
  • Transfusion de culots globulaires si hémoglobine < 7 g/dL
  • Indication neurochirurgicale si :
    • HED avec déviation médiane > 5 mm
    • HSD de volume > 30 mL
    • fracture ouverte du crâne
    • hématome temporal ou cérébelleux > 3 cm de diamètre

Suivi du traitement

  • Correction de la coagulation (l'objectif est d'obtenir un TP = 70% et des plaquettes ≥ 100 000)
    • si patient sous antiagrégants plaquettaires : transfusion de plaquettes (1 UI/ 7Kg de poids)
    • si patient sous AVK : Kaskadil® (25 UI/kg de facteur IX IVL) + vitamine K (5 mg IVD)
    • si hépatopathie : vitamine K + PFC + plaquettes
  • Prévention de tétanos
  • La prévention systématique des crises convulsives n'est pas recommandée

Surveillance

CLINIQUE

  • Score de Glasgow, examen des pupilles répété, réévaluation neurologique/h
  • Température, PA, FC, diurèse, SpO2

PARACLINIQUE

  • Doppler transcrânien

Devenir / orientation

L'orientation du patient victime d'un TCG doit se faire vers une structure capable de mettre en place un monitorage multimodal : capteur de PIC, doppler transcrânien et cathéter de saturation veineuse jugulaire en O2 (SvJO2)

  • Le plus souvent une salle de surveillance post interventionnelle (SSPI) disposant d'un service de réanimation, d'un scanner, d'un avis neurochirurgical et d'un laboratoire adapté, tous opérationnels en permanence
  • Pas d'indication à une neurochirurgie en urgence ne veut pas dire pas de surveillance neurochirurgicale
  • Il n'existe pas à ce jour d'accord professionnel concernant les critères d'orientation initiale entre un centre de proximité, non pourvu d'un service de neurochirurgie sur place, et un centre plus distant mais comprenant un service de neurochirurgie. Quel que soit le choix, la structure doit être capable de mettre en place la procédure d'évacuation d'un hématome intracrânien et ce sans délai

Mécanisme / description

  • Le cerveau est inclus dans un espace inextensible qu'est le crâne. Ainsi, une augmentation faible du volume intracrânien va rapidement entraîner une augmentation de pression
  • Le volume intracrânien (Vic) = Vc + Vlcr + Vs où Vc = volume du cerveau ; Vlcr = volume du LCR ; Vs = volume sanguin
  • Chez l'adulte, le Vic = 1500 mL dont 85-90% de Vc, 10% de Vs et < 3% du Vlcr.
  • Lors d'un TCG, un oedème cérébral se développe et augmente le volume relatif du cerveau
  • Un 2e concept important est la notion de pression de perfusion cérébrale (PPC) = PAM - PIC où PIC = pression intracrânienne. Le débit sanguin cérébral est stable entre 50 et 150 mmHg de PAM de par l'autorégulation. Au-delà de ces valeurs, les artérioles ne peuvent plus assurer l'autorégulation et le débit sanguin cérébral devient dépendant de la pression artérielle (PAM < 50 mmHg => ischémie cérébrale ; PAM > 150 mmHg = > HTIC)
  • L'autorégulation est défaillante après TC. Ainsi, le débit est directement fonction de la pression
  • 2 mécanismes dans le TC :
    • 1er mécanisme : résultat direct du traumatisme dû à l'impact direct sur le cerveau
    • 2e mécanisme : dû à l'HoTA, l'hypoxie, l'HTIC ou à des changements biochimiques induits par le traumatisme initial
  • La valeur normale de la PIC est de 0-15 mmHg (< 10 mmHg chez l'enfant). L'HTIC est délétère car diminue la PPC et le débit sanguin cérébral donc entraîne de l'ischémie cérébrale et de l'engagement.

Bibliographie

  • Chesnut RM, Marshall LF, Klauber MR, Blunt BA, Baldwin N, Eisenberg HM et al. The role of secondary brain injury in determining outcome from severe head injury. J Trauma, 1993, 34:216-22.
  • Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. Prise en charge des traumatisés crâniens graves à la phase précoce. Recommandations pour la pratique clinique. Ann. Fr. Anesth. Réanim. 1999, 18:1-172.
  • Guidelines for the management of sever traumatic brain injury. J Neurotrauma, 2007;24 Suppl 1:S91-5
  • Conférences d'actualisation tomodensitométrie de traumatisme crânien SFAR 2000

Auteur(s) : Saïd LARIBI, Hamdi BOUBAKER