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Fractures : clavicule


Spécialité : traumatologie /

Points importants

  • Epidémiologie : fracture fréquente chez l'enfant et le sujet sportif, représentant environ 15% des fractures vues aux urgences
  • Attention aux formes atypiques, notamment devant une impotence fonctionnelle du membre supérieur inexpliquée chez l'enfant
  • La fracture de clavicule témoigne d'un mécanisme traumatique violent : toujours rechercher des lésions de voisinage ostéo-articulaires, vasculaires, nerveuses, pleuro-pulmonaires
  • La grande majorité des fractures de la clavicule intéresse le tiers médian (75%) et requiert un traitement orthopédique par anneaux et bandage coude au corps
  • Seules quelques fractures du ¼ externe de la clavicule sont des indications opératoires, ainsi que les formes compliquées (fracture ouverte ou même une simple menace cutanée, comminutives, avec lésion vasculo-nerveuses...)
  • Faire toujours 2 incidences : face et vue aérienne avec rayon ascendant à 30°

Présentation clinique / CIMU

RAPPELS ANATOMIQUES

_789 Anatomie de la clavicule

  • La clavicule est un os long, fin et très superficiel (sous-cutané) fixant le membre supérieur au thorax : sa situation le rend vulnérable en cas de traumatisme de la région scapulaire ou du thorax
  • Relié par deux articulations :
    • articulation acromio-claviculaire
    • articulation sterno-claviculaire
  • Ces deux articulations sont également très vulnérables car superficielles et de petite taille
  • Principales structures anatomiques de proximité pouvant être à l'origine de lésions associées :
    • structures osseuses : omoplate, humérus, sternum et surtout le rachis cervical
    • structures musculaires : faisceaux du deltoïde, pectoraux, trapèzes, muscles de la face antérieure du cou
    • vaisseaux : artère et veine sous-clavières
    • structures nerveuses : plexus brachial, nerf phrénique

CONTEXTE

Terrain

  • L'adulte jeune et sportif ou ayant un métier physique
  • L'enfant (30%) notamment lors d'activités ludiques de plein air ou lors de chute sur le moignon de l'épaule au domicile
  • Plus rarement les personnes âgées

Mécanisme traumatique

  • Le plus souvent mécanisme indirect par chute sur le moignon de l'épaule, sur le coude ou encore sur la paume de la main avec l'ensemble du membre supérieur en position de rectitude
  • Plus rarement par mécanisme direct : chute ou projection d'objet lourd et contendant directement sur l'épaule, provoquant le plus souvent des fractures avec angle fracturaire vers la bas et parfois ouvertes
  • La forme typique est la fracture du tiers moyen (75%) chez l'adulte jeune suite à une chute sur le galbe de l'épaule

Antécédents

  • Rechercher essentiellement :
    • les ATCD médicaux pouvant être à l'origine d'une contre-indication chirurgicale ou thérapeutique :
      • allergies, intolérances ou complications de traitements antalgiques : AINS, aspirine, dextropropoxyphène, tramadol...
      • ATCD cardiaques, respiratoires, néphro-urinaires, métaboliques (diabète)...
    • les ATCD traumatiques et chirurgicaux, notamment au niveau de l'épaule :
      • fracture préexistante de la clavicule, de l'humérus
      • ATCD de luxation gléno-humérale, acromio-claviculaire ou sterno-claviculaire
      • lésions musculaires du deltoïde, des pectoraux ou trapèzes

SIGNES FONCTIONNELS

  • Douleur de la région scapulaire et/ou claviculaire, pouvant être très intense (parfois EVA = 8 à 10 chez certains patients)
  • Impotence fonctionnelle quasi-totale de l'épaule, autant en antépulsion, rétropulsion, adduction, abduction qu'en rotations

EXAMEN CLINIQUE

Inspection

_790 Photo Inspection de la clavicule

  • Membre supérieur pendant le long du corps
  • Abaissement du moignon de l'épaule
  • Tête inclinée du coté de la fracture
  • Déformation angulaire de la région claviculaire avec oedème, ecchymose (inconstants dans les traumatismes indirects)
  • Réduction possible de la distance acromio-sternale
  • Toute plaie en regard d'une fracture de clavicule doit faire suspecter une fracture ouverte spontanément refermée, notamment s'il s'agit d'un mécanisme indirect
  • Rechercher systématiquement tout signe de traumatisme associé, notamment de la tête, du cou et de la cage thoracique

Palpation

  • La mobilisation de l'épaule est souvent possible mais limitée dans ses amplitudes par la douleur
  • Noter les limites d'amplitudes dans le dossier pour le suivi ultérieur, notamment si accident de travail, de sport (caractère médico-légal)

Recherche de complications locorégionales, en particulier

  • Vasculaires : palpation systématique des pouls huméral (face interne du bras ou du coude), radial et cubital
  • Nerveuses : testing moteur systématique du membre du coté lésé, en comparatif avec le coté sain, associé à un examen exhaustif des sensibilités par dermatome à la recherche de signe d'atteinte plexique ou radiculo-nerveuse
  • Thoraciques :
    • rechercher des fractures de côtes potentiellement associées
    • examen pleuro-pulmonaire et cardiaque complet : contusion pulmonaire, pneumothorax ou hémothorax, contusion myocardique
  • Cervico-céphaliques : Toute fracture indirecte de la clavicule correspond jusqu'à preuve du contraire à un ébranlement latéral brusque du rachis cervical et possiblement d'un traumatisme temporo-pariétal associé

On distingue 3 types de fractures
N.B. : Les fractures de l'extrémité sternale (1/3 médial), les fractures du 1/3 moyen et celles du 1/3 acromial (1/3 latéral) de la clavicule

  • Fractures du 1/3 moyen :
    • ce sont les plus fréquentes (70 à 90% des cas)
    • elles peuvent être simples (2 fragments), à 3 ou 4 fragments, bifocales avec 3e fragment intermédiaire basculé menaçant la peau
    • le segment latéral est souvent déplacé vers le bas attiré par la pesanteur et le segment médial déplacé vers le haut attiré par le sterno-cleïdo-mastoïdien
  • Fractures du 1/3 médial :
    • elles sont relativement rares (5%)
    • souvent peu déplacées
    • à 2 ou plusieurs fragments
  • Fractures du 1/3 latéral :
    • elles sont plus fréquentes que les fractures du 1/3 médial (10 à 15%)
    • elles peuvent être extra ou intra-articulaires
    • la classification de Neer est la plus utilisée. La fracture est identifiée par rapport aux ligaments coraco-claviculaires :
      • type I : en dehors des ligaments coraco-claviculaires ; si les ligaments sont intacts, la fracture est stable, s'ils sont rompus, la fracture est instable (équivalent de disjonction acromio-claviculaire)
      • type II : au niveau des ligaments coraco-claviculaires ; avec 2 stades : IIa en dedans des ligaments coraco-claviculaires et IIb, à travers les ligaments coraco-claviculaires ; à noter 1 cas particulier : la fracture de Latarjet qui correspond à un type IIb avec écaille osseuse inférieure solidaire des ligaments coraco-claviculaires
      • type III : atteinte de l'articulation acromio-claviculaire

Signes paracliniques

IMAGERIE

  • Incidence claviculaire de face avec rayon ascendant à 30°

Diagnostic différentiel

  • D'une fracture du quart externe de clavicule : disjonction acromio-claviculaire
  • D'une fracture du 1/3 interne de clavicule : disjonction sterno-claviculaire

Traitement

  • Traitement toujours controversé, avec opposition entre les partisans du traitement chirurgical et les partisans du traitement orthopédique
  • En cas de traitement orthopédique, il faut savoir qu'il n'y a pas d'immobilisation parfaite des fractures de la clavicule. On utilise habituellement des anneaux amovibles, en huit de chiffre, que l'on doit porter jusqu'à disparition des douleurs (30 à 45 jours). Il faut resserrer régulièrement ces anneaux qui se détendent très facilement
  • En cas de traitement chirurgical, le meilleur traitement est probablement l'ostéosynthèse par plaque vissée
  • Les indications actuelles du traitement chirurgical sont les suivantes : fractures très déplacées du 1/3 moyen, fractures avec 3e fragment intermédiaire basculé et verticalisé, fragment menaçant la peau, équivalents de disjonction acromio-claviculaire (hauban et non pas plaque vissée) ; ceci représente environ 50% des indications thérapeutiques

Devenir / orientation

CRITERES DE SORTIE

  • Retour au lieu de vie en l'absence d'indication chirurgicale

ORDONNANCES DE SORTIE

  • Traitement pour 2 à 3 semaines :
    • antalgiques de niveau I ou II selon l'intensité de la douleur
    • +/- AINS en l'absence de contre-indication
  • Consigne de maintenir l'immobilisation en permanence les 3 premières semaines
  • Radiographies de contrôle (cliché de face de la clavicule) dans 10 jours
  • Programmer un rendez-vous en consultation post-urgences

RECOMMANDATIONS DE SORTIE

  • Laisser le membre au repos
  • Porter les anneaux claviculaires autant que possible de jour comme de nuit
  • Réajuster le serrage si nécessaire, sans forcer (risque de compression vasculo-nerveuse)
  • Attention aux lésions de compression au niveau du creux axillaire due à des anneaux mal positionnés (surveiller l'apparition d'un oedème du membre supérieur, la coloration de la main, la sensibilité, la motricité des doigts (risque évolutif de thrombophlébite du membre sup)

Bibliographie

  • Alao D, Guly H. Missed clavicular fracture; inadequate radiograph or occult fracture? Emerg Med J 2005;22:232-3
  • Cocks RA. Best evidence topic reports: fracture of the clavicle. J Accid Emerg Med 1999;16:389-90
  • Kochhar T, Jayadev C, Smith J, Griffiths E, Seehra K. Delayed presentation of Subclavian venous thrombosis following undisplaced clavicle fracture. World J Emerg Surg 2008;3:25
  • Mandal A, Jordaan J, Missouris C. Fractured clavicle and vascular complications. Emerg Med J 2004;21:648
  • Traumatologie à l'usage de l'urgentiste. Sous la direction de Dominique Saragaglia. Editions Sauramps Médical. 2004

Auteur(s) : Frédéric JOYE, Jean-Jacques BANIHACHEMI, Dominique SARAGAGLIA